La ministre du Travail veut avancer sur l’emploi des seniors

Lors d’un déplacement au siège de L’Oréal, jeudi 21 mars, Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités s’est montrée déterminée à agir pour l’emploi des seniors et pour l’insertion professionnelle des plus éloignés du marché du travail. Les conclusions des travaux des partenaires sociaux sont attendues avec impatience.

Par  – Le 25 mars 2024. Le quotidien de la formation

Identifier des bonnes pratiques en matière d’emploi des seniors. C’était le sens de la visite de Catherine Vautrin au siège du groupe L’Oréal à Clichy dans les Hauts-de Seine, jeudi 21 mars. Pendant plus d’une heure, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités a échangé avec des membres de la direction et des salariés, les interrogeant sur les modalités pratiques des solutions mises en œuvre au sein du groupe qui emploie 15 000 personnes en France. « C’était passionnant d’entendre une entreprise extrêmement engagée sur le travail des seniors », s’est enthousiasmée la ministre à l’issue de sa visite. Il faut dire que le géant des cosmétiques a pris une longueur d’avance sur les questions d’employabilité des seniors.

L’Oréal s’engage pour l’emploi des seniors

Son programme « l’Oréal for all generations » lancée en France en 2022 comporte plusieurs dispositifs destinés aux salariés de plus de 50 ans, qui représentent 28 % des effectifs en France. Un accompagnement ciblé sur l’employabilité qui démarre bien avant la deuxième partie de carrière. Le groupe associe par exemple les salariés expérimentés aux formations destinées aux jeunes qui rejoignent l’entreprise. « Un moyen de favoriser la transmission et l’échange entre générations », souligne Hervé Navellou président de l’Oréal France. Avec ce programme, la formations s’envisage à toutes les étapes d’une carrière pour développer l’employabilité. « 80 % des collaborateurs de plus de 50 ans dans le groupe suivent au moins une formation chaque année », précise-t-il. En complément, des séminaires leur sont proposés pour les aider à cartographier leurs compétences et anticiper leur évolution de carrière.

Se préparer avec le congé fin de carrière

Actions de prévention autour de la santé et du bien-être au travail, et dispositifs destinés à faciliter la transition vers la retraite ou à préparer un nouveau projet de vie complètent ce programme. Les salariés ayant exercé au moins 20 ans au sein du groupe peuvent par exemple bénéficier d’un « congé de fin carrière » à prendre en une fois ou de manière fractionnée. Limité à neuf mois, ce congé peut être allongé en contrepartie d’une baisse de rémunération ou associé à d’autres dispositifs comme le compte épargne temps. Chaque année, 250 personnes mobilisent ce congé de fin de carrière.

Un bilan à mi-carrière pour faire le point

Employabilité, mobilité professionnelle, prévention, transitions vers la retraite : autant de sujets explorés dans le cadre de la négociation interprofessionnelle dont Catherine Vautrin attend les conclusions avec impatience. Alors que se profile un décalage de quinze jours dans le calendrier des partenaires sociaux, la ministre « souhaite pouvoir avancer dans les meilleurs délais » pour améliorer le taux d’emploi des seniors et notamment des 60-64 ans qui plafonne à 33 %. « Un drame français », selon elle, au regard des indicateurs d’autres pays européens. Parmi les pistes évoquées par les partenaires sociaux, le bilan à 360 ° à mi-carrière lui parait intéressant. Non seulement parce qu’il « semble faire consensus », mais surtout pour permettre aux salariés de « s’interroger sur leur 2ème partie de carrière et d’avoir de la visibilité ».

L’accès à la formation, toujours une priorité

Au cours de sa visite, la ministre a rappelé les ambitions du gouvernement en termes de plein emploi et les bénéfices attendus de la transformation de Pôle emploi en France Travail. L’accompagnement associé à un contrat d’engagement doit permettre de lever les freins au retour à l’emploi (logement, transport, etc.) et de proposer des immersions en entreprise et des formations pour renforcer l’employabilité. Lors des discussions avec les salariés seniors de l’Oréal qui ont changé de poste à plusieurs reprises, Catherine Vautrin a souligné l’importance de développer ses compétences tout au long de la vie. « L’accès à la formation, c’est vraiment un sujet ». Un enjeu auquel répond, entre autres, le compte personnel de formation. A condition que l’instauration prochaine du reste à charge ne vienne pas freiner son utilisation.

CPF, le reste à charge en question

Interrogée sur le sujet, Catherine Vautrin rappelle le taux de 11 % d’abandon pour les formations mobilisées via le CPF. Faire participer les bénéficiaires pourrait alors s’envisager comme une incitation à aller jusqu’au bout du parcours. Le CPF doit être envisagé comme « un outil d’accès à l’emploi » selon la ministre qui se dit « attachée, à titre personnel, à un lien entre métiers en tension et CPF ».  A ce stade, le montant et les modalités du reste à charge ne sont toujours pas calés, précise-t-elle.

Édito innovation mars-avril 2024 – IA : un urgent besoin de formation ?

Preuve que les IA génératives ne sont pas qu’une affaire d’experts que pourrait ignorer l’essentiel de la société, les appels à accompagner leur déploiement d’un vaste volet formation se multiplient.

Par  – Le 19 mars 2024. Centre Inffo

Faut-il craindre une nouvelle fracture numérique ? C’est ce que semble penser nombre d’observateurs, toujours plus enclins à prédire un avenir délicat aux actifs qui n’auront pas pris le train de l’IA. Non qu’ils seront directement remplacés par l’IA, mais par ceux qui auront appris à s’en servir.

Et pour les auteurs du rapport sur l’intelligence artificielle remis au président de la République le 13 mars, ce ne sont pas seulement les individus qui sont menacés dans leur employabilité, mais le pays tout entier dans sa compétitivité. D’où l’appel à lancer un « plan de sensibilisation et de formation de la Nation. » L’article complet est à retrouver en une de cette 40e édition de la lettre de l’innovation.

À Centre Inffo, cette sensibilisation a déjà commencé avec un séminaire collectif qui a permis une première acculturation de l’ensemble des salariés. Appréciée, la démarche n’est pas sans lendemain puisqu’elle se poursuit avec un groupe de travail réunissant des consultants de l’association, accompagnés par un prestataire extérieur pour approfondir la réflexion sur les usages qui pourraient venir enrichir l’activité de Centre Inffo. Les journalistes ont eux aussi bénéficié d’un petit supplément, avec deux jours de formation destinés à leur faire prendre la mesure du potentiel de l’IA au sein d’une rédaction. À suivre…

Intérim Centre Inffo pour le Fffod

C’est le Fffod, Forum des acteurs de la formation digitale, qui l’annonce dans sa dernière lettre, « Sarah de la Morandière a été élue à la présidence du FFFOD lors du conseil d’administration qui s’est tenu le 6 mars 2024 après la démission de son prédécesseur Joël Ruiz nommé à la tête de la commission Certifications de France compétences. Jusqu’à présent Sarah de la Morandière occupait la fonction de secrétaire générale de l’association et trésorière adjointe. » Consultante Centre Inffo, Sarah de la Morandière assurera la présidence jusqu’à la prochaine assemblée générale du Fffod, programmée pour juin 2024.

AU SOMMAIRE DU N° 40 DE LA LETTRE DE L’INNOVATION 

CORNER

  • Devenez Facilitateur d’Apprenance
    Traindy lance cette année une masterclass « Facilitateur d’Apprenance » dont vous pouvez suivre le webinaire de présentation ci-dessous. Alors que l’engagement des apprenants est une question aujourd’hui brulante pour la plupart des formateurs, l’arrivée en force de l’IA vient en plus questionner leur posture, souvent descendante et experte. Afin de répondre à cette double problématique, nous proposons d’accompagner les formateurs et ingénieurs pédagogiques à intégrer une posture de facilitation visant à développer l’apprenance des participants.
  • Ecofrugal, une solution pour avancer sur son chemin de transition écologique (interview France Bleu Paris)
    Des pistes pour réaliser sa transition écologique à la maison ou au travail, c’est ce que propose la start-up Ecofurgal. Son fondateur, Philippe Lévêque, a expliqué comment à France Bleu Paris. 6 minutes pour comprendre ?

 

Geoffroy de Vitry nommé haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels

Nommé haut-commissaire à l’enseignement et à la formation professionnels par décret du 13 mars, Geoffroy de Vitry reprend les attributions de l’ancienne ministre déléguée Carole Grandjean. Il est placé sous l’autorité à la fois de la ministre du travail Catherine Vautrin et de la ministre de l’éducation nationale Nicole Belloubet.

Par  – Le 15 mars 2024. Le quotidien de la formation

 

Le décret du 11 mars instituant un haut-commissariat à l’enseignement et à la formation professionnels précise que le haut-commissaire aura pour mission « de proposer des orientations en matière d’enseignement professionnel et de formation professionnelle initiale ».

Il proposera aussi « des orientations en matière de formation professionnelle des actifs, favorisant l’insertion dans l’emploi, le maintien de l’employabilité tout au long de la vie et l’adéquation des formations avec les besoins des entreprises et des territoires ». Il conduira « un dialogue avec les Conseils régionaux, les partenaires sociaux et l’ensemble des acteurs nécessaires à la réalisation de ses missions, dans le respect de leurs compétences, sur ces orientations et les modalités d’intervention de l’Etat. »

Geoffroy de Vitry « coordonnera au niveau interministériel les travaux relatifs à l’enseignement et la formation professionnels » et « assurera le suivi de la mise en œuvre des politiques de l’enseignement et de la formation professionnels. »

Diplômé de l’école des Hautes études commerciales (HEC) et de l’Institut d’études politiques de Paris, le nouveau haut-commissaire a notamment été directeur de cabinet adjoint puis directeur de cabinet du ministre du travail Olivier Dussopt de mai 2022 à janvier 2024.

 

Les Transitions Pro ont accompagné plus de 60 000 projets en 2023

Tous dispositifs confondus, le nombre de projets accompagnés par les associations Transitions Pro a augmenté de 7 % entre 2022 et 2023. Ce bilan intervient alors que l’évolution des dispositifs de reconversion est au cœur de l’actualité et que des problématiques de financement se posent pour certains d’entre eux.

par – Le 14 mars 2024. Le quotidien de la formation

L’année 2023 a été dynamique pour les associations Transitions Pro qui accompagnent les salariés dans leur reconversion. Grâce à leur action et aux différents dispositifs qu’elles financent ou enclenchent, plus de 60 000 projets ont pu se concrétiser. C’est 7 % de plus comparé à 2022, selon les données publiées fin février par Certif Pro, leur tête de reseau. L’année 2023 a aussi été marqué par un renforcement des synergies avec d’autres acteurs de l’emploi et de la formation. Opérateurs de compétences, conseils régionaux, Carif-Oref, opérateurs du conseil en évolution professionnelles… : comme les années précédentes, « de nombreuses conventions de partenariat ont été nouées au niveau régional et national », indique Séverine Garandeau-martin, présidente (CFDT) de Certif Pro.

PTP : moins de dossiers financés

Dans le détail, les associations Transitions Pro ont financé près de 19 000 projets de transition professionnelle (PTP), dispositif qui permet de prendre en charge les coûts de formation et la rémunération des bénéficiaires. Alors que la demande évolue à la hausse, le nombre de dossiers financés diminue par rapport à 2022 (19 275). En cause : « la dotation allouée à ce dispositif n’a pas évolué depuis deux ans, alors que les coûts par dossier ont augmenté sous l’effet de l’inflation et de l’augmentation des salaires », précise la présidente de Certif Pro. Résultat : le taux de dossiers acceptés est passé de 71 % à 66 % en un an.

Transco peine à décoller

Plus récent, le dispositif « Transition collective » conçu par les partenaires sociaux pour accompagner les salariés dont l’emploi est menacé a bénéficié à 352 personnes en 2023. Si le nombre de dossiers financés augmente d’année en année (une centaine en 2021 et près de 280 en 2022), le dispositif peine à trouver sa place dans le paysage. Plusieurs raisons à cela : les entreprises, parfois frileuses à l’idée d’exprimer le fait qu’elles sont en difficultés, ne se tournent pas spontanément vers le dispositif, et les salariés ont parfois du mal à se projeter dans un nouveau métier et une autre entreprise, sans compter la concurrence d’autres dispositifs. Pourtant, quand les perspectives d’emploi et l’entreprise d’accueil sont clairement identifiées en amont des parcours, Transco donne de bons résultats, selon Séverine Garandeau-Martin.

« Démission-reconversion », un outil prisé par les entrepreneurs

Autre champ d’intervention des associations Transitions Pro : le dispositif « Démission-reconversion » pour lequel elles sont amenées à attester du « caractère réel et sérieux » des projets présentés. En 2023, elles ont validé 22 000 dossiers, soit 12 % de plus comparé à 2022. « Malgré le peu de publicité faite autour du dispositif, la demande est en constante augmentation et la courbe du nombre de bénéficiaires dépasse maintenant celle du PTP », commente la présidente de Certif Pro. Mais en pratique, cet outil qui permet aux salariés de démissionner et de bénéficier de l’assurance chômage pour réaliser leur projet de reconversion, répond à des besoins différents. Il est surtout utilisé par des cadres qui veulent créer ou reprendre une entreprise alors que le PTP concerne davantage aux personnes moins qualifiées.

Montée en puissance de la VAE

Confirmé dans son rôle de financeur de la VAE en 2022, le réseau des associations Transitions Pro a accompagné 6 000 personnes dans cette voie d’accès à la certification. C’est deux fois plus qu’en 2022. Une montée en puissance qui marque une pause en ce début d’année faute de visibilité sur le budget qui pourra être mobilisé à l’avenir. L’association Certif Pro a obtenu un accord de principe de la part des services du ministère du Travail quant à la reconduction des financements mais reste dans l’attente d’une confirmation officielle.

CléA : un certificat à rebooster

Certif Pro porte aussi la certification CléA et ses déclinaisons (CléA Numérique, CléA Management). En 2023, un peu plus de 13 000 sésames ont été délivrés contre 14 000 en 2022. Cette baisse de régime concerne davantage les salariés que les demandeurs d’emploi. Pour inverser la tendance, Certif Pro prévoit de remettre un coup de projecteur sur cet outil de valorisation des compétences de base à l’occasion de la remise, cette année, du 100 000ème certificat. La dynamique dépendra aussi des financements mobilisés autour de Cléa. « La prise en charge de l’évaluation des candidats à la certification qui relevait du plan d’investissement dans les compétences devra désormais être négociée avec les Régions ou avec France Travail », explique Séverine Garandeau-Martin.

Un contexte incertain

Manque de visibilité sur le financement de certains outils, incertitude sur le devenir des dispositifs destinés à l’accompagnement des reconversions dans l’attente des conclusions de la négociation interprofessionnelle… : les associations Transitions Pro évoluent dans un contexte mouvant. « Nous sommes à la croisée des chemins, mais sur le terrain, les équipes restent mobilisées pour assurer un service de qualité aux bénéficiaires », assure la présidente de Certif Pro.

 

Transitions Pro – chiffres clés 2023

  • 19 000 Projets de transition professionnelle (PTP) financés
  • 22 000 dossiers « Démission-reconversion » acceptés
  • 6 000 projets de VAE accompagnés
  • 352 parcours financés dans le cadre de Transco
  • Plus de 13 000 certificats CléA délivrés

 

 

 

Quand formation rime avec promotion (Céreq)

Les salariés qui évoluent le plus en entreprise sont aussi ceux qui ont le plus accès à la formation, ont remarqué deux chercheurs du Céreq dans une nouvelle étude. Ils préconisent un meilleur accès au CEP pour les salariés oubliés de la formation.

Par  – Le 06 mars 2024. Le quotidien de la formation

Comment se construisent et se différencient les parcours dans l’entreprise ? C’est la question que se sont posée Ekaterina Melnik-Olive et Camille Stephanus, deux chercheurs du Céreq dans une étude parue en mars 2024. L’évolution dans l’entreprise ne garantit plus systématiquement une mobilité ascendante, remarquent les auteurs qui ont choisi d’étudier cette diversité de parcours sous l’angle de l’accès à la formation. Ils constatent ainsi que les salariés promus sont aussi ceux qui sont les plus formés par leur entreprise. Mais ces parcours ascendants ne concernent qu’une partie des salariés.  D’autres sont bloqués sur des emplois peu qualifiés ou sont fragilisés par une restructuration, et ont moins accès à la formation malgré leurs besoins et leurs souhaits.

Cinq types de parcours

A partir de leurs données, les chercheurs ont identifié cinq types de parcours : Les deux premiers parcours (52 % des effectifs) se caractérisent par des promotions. Le premier type regroupe 28% des effectifs, des jeunes à niveau de diplôme élevé, souvent cadres dans de grandes entreprises. Le deuxième, 24% des effectifs, concerne ceux dont la promotion valorise la fidélité. Ils sont plus souvent de qualification intermédiaire et travaillent dans des PME.

Le troisième type de parcours (28% des effectifs) correspond à des carrières stables, sans promotion ni déclassement. Ces salariés sont plus âgés et se satisfont de leur emploi et ont moins d’attentes en matière de formation. Ils travaillent davantage dans de petites entreprises.

Evolutions professionnelles moins favorables

Enfin les deux derniers types de parcours ont des évolutions professionnelles moins favorables : Le quatrième type -12% des effectifs- a une carrière bloquée et une faible satisfaction dans l’emploi. Ce sont notamment les ouvriers non qualifiés ou les employés du commerce mais aussi les salariés handicapés ou avec un problème de santé. Leurs attentes de formation sont peu prises en compte.

Le dernier type de parcours (8%) rassemble des salariés plus qualifiés fragilisés par des changements organisationnels ou technologiques dans leurs entreprises. Près de huit salariés sur dix ont déclaré des baisses d’autonomie, d’intérêt ou une dégradation des conditions de travail, mais les pertes de responsabilité et de salaire y sont aussi beaucoup plus fréquentes. Ce sont souvent des seniors, mais aussi très majoritairement des femmes dans des professions intermédiaires ou employées administratives. La formation ne répond pas à leurs attentes alors que plus de la moitié disent vouloir se former.

Utiliser le CEP

Les chercheurs relèvent que ce sont les salariés les plus fragiles, dans des parcours de déclassement, dont les aspirations de formation sont les moins prises en compte par les entreprises. Ils préconisent de favoriser l’information et l’accompagnement de ces salariés grâce au CEP (conseil en évolution professionnelle) que la plupart ne connaissent pas. Le CEP permettrait de mieux prendre en compte leurs problématiques spécifiques et ainsi définir l’horizon de leur évolution professionnelle.

Consulter l’ouvrage du Céreq.

La sous-traitance dans la tourmente sur le marché du CPF

Le 1er avril prochain, de nouvelles obligations s’imposeront aux organismes de formation présents sur le marché du CPF. Dans le sillage de la loi anti-fraude, un décret y encadre la sous-traitance. Pour les donneurs d’ordre, son application tient du casse-tête. Ils vont devoir interroger et professionnaliser leurs pratiques.

Par  – Le 04 mars 2024. Le Quotidien de la formation

Jusqu’ici la sous-traitance, une pratique courante dans le monde de la formation, n’avait jamais fait l’objet d’une définition juridique et d’une réglementation de ses usages.  Une zone grise dans laquelle se sont glissés des organismes de formation peu scrupuleux pour proposer du portage Qualiopi sur la plateforme CPF.  La loi anti-fraude de décembre 2022 sonne la fin de la partie en ouvrant la voie à un encadrement de la sous-traitance sur ce marché sensible. En première ligne, le donneur d’ordre est responsable de la mise en conformité de ses sous-traitants. C’est bien lui qui risque, le cas échéant, un déréférencement. Ses contrats signés à partir du 1er avril devront respecter les éléments définis par le décret d’application et il devra s’assurer que ses sous-traitants remplissent leurs obligations en matière de qualité, de respect des CGU ou d’habilitation à délivrer une certification professionnelle. Cette nouvelle mesure de régulation ravive un sujet longtemps resté en suspens. Pièce maîtresse du modèle économique des organismes de formation, la sous-traitance réalisée parfois en cascade passe sous les radars du système qualité. De nombreux formateurs indépendants travaillent ainsi sous des statuts différents et sur une base contractuelle pas toujours bien formalisée.

Vers une structuration de la sous-traitance ?

« La question de la sous-traitance n’est pas nouvelle. On se souvient des débats suscités autour de l’obligation pour les sous-traitants de se soumettre à la déclaration d’activité inscrite dans la loi de modernisation sociale en 2002. Il s’agissait déjà à l’époque de répondre à des enjeux de transparence et de clarification du droit applicable », rappelle Fouzi Fethi, responsable du pôle droit et politiques de formation au sein de Centre Inffo. Cette fois, la réglementation va plus loin en imposant, dans certains cas, les mêmes obligations aux sous-traitants qu’à leurs donneurs d’ordre inscrits sur la plateforme CPF. Soucieux de ne pas déstabiliser le marché dominé par le recours à des prestataires extérieurs, le législateur marche sur des œufs. Le décret prévoit ainsi de nombreuses dérogations liées au statut des sous-traitants ou à la nature de leurs missions. Pour s’y retrouver, le donneur d’ordre doit, avant toute chose, déterminer ce qui, dans ses activités, relève de la sous-traitance. Or, dans le champ de la formation, la question se révèle plus délicate qu’il n’y paraît.

Qu’est ce qui relève de la sous-traitance en formation ?

L’étiquette, parfois impropre, de la sous-traitance recouvre en effet des réalités différentes : un expert apporte un éclairage, un professionnel partage son expérience, un formateur indépendant anime une session, un autre la conçoit et la réalise, un mentor guide l’apprenant dans son parcours de digital learning. Le décret fournit des indications en précisant ce que doit contenir le contrat de sous-traitance : « les missions exercées au titre de l’intervention confiée, le contenu et la sanction de la formation, les moyens mobilisés ainsi que les conditions de réalisation et de suivi de l’action, sa durée, la période de réalisation ainsi que le montant de la prestation ». Une manière de renvoyer à la définition d’une action de formation réalisée tout ou partie par le sous-traitant. Dans cet esprit, un témoignage, une expertise ou un partage d’expérience n’ont pas vocation à entrer dans le périmètre visé par le texte réglementaire. Le donneur d’ordre devra donc avant tout se poser la question de la nature de la prestation qu’il confie à l’extérieur.

Des zones grises à éclaircir

Mais son travail pour se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation ne s’arrête pas là. Une fois établie la liste de ses activités concernées, il devra identifier si le statut de son sous-traitant le rend éligible aux dérogations prévues par le décret. Si l’obtention de la certification Qualiopi devient la norme, les personnes physiques opérant sous le régime micro-social et ne dépassant pas un chiffre d’affaires annuel de 77 700 euros (plafond des auto-entrepreneurs) en sont exemptés. Ces derniers n’auront pas non plus à aller chercher une habilitation à former pour une certification professionnelle tout comme le sous-traitant n’intervenant que sur une partie d’un parcours y menant et ne réalisant pas une formation menant à un bloc de compétences. Malgré les efforts du législateur pour coller à la réalité disparate de la sous-traitance, deux cas de figure posent encore question aux yeux des juristes : le sous-traitant en portage salariale et le formateur en intérim. La mise en œuvre de ces dispositions s’annonce complexe. Des foires aux questions (Faq) du ministère du Travail et de la CDC sont attendues prochainement. Elles devraient notamment permettre d’éclaircir les modalités de calcul du plafond autorisé des activités réalisées par la voie de la sous-traitance fixé à 80% du chiffre d’affaires réalisé sur la plateforme CPF par le donneur d’ordre.

 

Pour aller plus loin, suivre la master class de Centre Inffo, « Sous-traitance et CPF : en pratique, ce qui change le 1er avril 2024 ».

 

Les clés de réussite de l’accompagnement social des demandeurs d’emploi

Proposer un suivi individualisé pour lever les freins périphériques à l’emploi en parallèle d’un cursus d’enseignement ne garantit pas le succès des stagiaires. Encore faut-il que les personnes en charge de ce volet social de soutien aux personnes éloignées de l’emploi disposent des compétences requises et d’une stabilité dans leur poste, établit le Cereq dans une récente étude.

Par  – Le 28 février 2024. Le quotidien de la formation

 

Trouver une place en foyer de jeunes travailleurs pour un stagiaire qui vivait à la rue avant d’entamer son parcours de formation. Aider au montage d’un dossier de demande de reconnaissance en qualité de travailleur handicapé. Favoriser un suivi médical. Autant de mesures de soutien possibles à destination de stagiaires de la formation professionnelle dans le cadre d’un accompagnement social pour aider à leur insertion. Ces dispositifs s’adressent aux personnes éloignées de l’emploi.

Le Cereq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications) a analysé les résultats obtenus d’un tel dispositif, baptisé « Prépa rebond dispositif intégré ». Il s’agit d’une expérimentation menée en métropole dans le cadre d’un plan régional d’investissement dans les compétences. Les résultats de cette enquête qualitative sont parus en janvier.

Un accompagnement à double entrée

Le programme combine au sein des organismes de formation participants un accompagnement professionnel (construction du projet, acquisition des compétences, recherche d’emploi) à un accompagnement social pour lever les freins périphériques à l’emploi (comme la mobilité, le logement, la santé…). L’objectif ? Sécuriser les parcours, éviter les ruptures et les abandons, grâce à un suivi individualisé des personnes pas ou peu qualifiées âgées de 16 ans ou plus et éloignées de l’emploi. Le dispositif comprend quatre phases : un sas pour évaluer motivations, souhaits en matière d’emploi… Puis l’élaboration du projet professionnel, l’entrée en formation et, enfin, un suivi à trois mois.

Succès sous conditions

Résultat ? Deux facteurs conditionnent grandement l’efficacité de l’accompagnement social. D’abord, le profil des professionnels qui le réalisent. Le résultat sera d’autant meilleur qu’il s’agira de personnes dédiées, recrutées pour cela et dotées des compétences nécessaires en matière d’insertion, elles-mêmes stables dans leur poste. Les chercheurs vont jusqu’à observer qu’un trop important turn over des accompagnants insécurise plus qu’il n’étaie le parcours des personnes qu’ils sont supposés aider à s’insérer.

Autre variable : la portée du dispositif fluctue selon l’histoire des stagiaires. Des personnes en emploi précaire, souvent victimes d’une urgence économique, rencontrent plus de risques d’abandon que, par exemple, des jeunes en décrochage scolaire tout juste sortis de l’école pour qui la formation peut offrir un parcours sécurisant. Enfin, les inégalités géographiques, du nombre d’organismes de formation présents sur un territoire par exemple, ajoutent à la complexité de certains parcours.


Le détail de l’enquête « Bref_449_accompagement DE du Cereq

Repenser l’emploi des seniors

Sujet de la négociation interprofessionnelle en cours, l’emploi senior souffre de freins au recrutement et d’un déficit d’implication des entreprises dans la gestion de carrière des plus de 45 ans. Dans un contexte de pénurie de compétences, Experconnect invite à sortir du cadre pour valoriser autrement l’expertise des profils les plus expérimentés.   

Par  – Le 28 février 2024. Le quotidien de la formation

En France, le taux d’emploi des seniors fait toujours partie des plus faibles en Europe. Il faut dire que nous revenons de loin. A partir des années 1970, les politiques publiques ont favorisé leur sortie du marché du travail pour lutter contre le chômage de masse à l’aide de différents dispositifs de préretraite. Face au déséquilibre des régimes de retraite, le crédo change à partir des années 2000 et la plupart d’entre eux sont abandonnés. Mais le mal était fait. Les politiques de ressources humaines investissent en priorité sur les parcours de leurs jeunes talents et délaissent trop souvent la gestion de carrière des plus de 45 ans.

Aujourd’hui, le vieillissement de la population active, la pénurie de compétences et la dernière réforme des retraites imposent de prendre le sujet à bras-le-corps. Dans certaines filières à cycle long particulièrement sensibles comme le nucléaire ou le ferroviaire, les conséquences se font encore sentir. « Les effets de la pyramide des âges et des départs à la retraite anticipés privent les entreprises de compétences et de savoir-faire précieux. L’impact en matière de performance a été sous-estimé dans de nombreuses industries », confirme Gilles Effront, co-fondateur d’Experconnect.

Depuis 2005, ce cabinet conseil propose aux entreprises les compétences de profils expérimentés, jeunes retraités ou préretraités. Plus de 8 000 professionnels seniors de son réseau accomplissent ainsi des missions d’une journée à trois mois sur des projets dans les domaines de l’innovation, de l’ingénierie, des restructurations, de la stratégie de développement ou encore de la gestion des ressources humaines.

Favoriser de nouvelles formes d’emploi pour les seniors

Pour relancer l’emploi senior, de nombreuses pistes sont évoquées et discutées par les partenaires sociaux dans le cadre de leur négociation interprofessionnelle « Pacte de la vie au travail » lancée au début de l’année. Certaines portent sur des incitations au recrutement (CDI senior) ou au maintien dans l’emploi (Index senior), d’autres misent sur la formation et une meilleure gestion des carrières dans les entreprises. Toutefois, certaines voix défendent une vision plus large et préconisent des solutions innovantes dans un monde du travail en pleine transformation où l’expérience des seniors a toute sa place.

« Nous avons besoin de changer de regard et d’approche sur l’emploi senior. L’offre et les dispositifs de formation ne sont pas toujours adaptés. Il faudrait, par exemple, favoriser l’accès au CPF qui reste trop souvent non consommé au moment du départ à la retraite. Autre piste de réflexion, l’index senior ne devrait pas se limiter au salariat pour intégrer les autres formes d’emploi », avance Gilles Effront.

Au fil des enquêtes (voir encadré), on mesure le poids des idées reçues. Loin de tourner le dos au travail, de nombreux seniors y compris après leur départ à la retraite, restent motivés par le désir de transmettre leur savoir-faire, répondant ainsi à un des enjeux forts des entreprises. Experconnect en fait l’expérience depuis près de 20 ans. Les membres de son réseau suivent deux courtes formations pour les outiller à leur nouveau statut d’indépendant et à leurs missions.

 

Seniors et entreprises, le grand malentendu ? 

Les résultats d’une enquête récente réalisée par le cabinet Robert Walters confirment les stéréotypes et les malentendus dont souffre l’emploi senior. Le blocage intervient dès le process de recrutement. Ainsi, 66 % des cadres estiment que les seniors sont exclus sur CV. De leur côté, 32 % des entreprises déplorent un manque de candidatures, qui selon elles, constituerait le principal frein à leur recrutement. Autre écart de perception tenace, les ressorts de la motivation des seniors. Systématiquement invoquée, leur rémunération, jugée trop élevée par 92 % des cadres et 78 % des entreprises, aurait un impact négatif sur l’employabilité des seniors. Or, selon Aude Boudaud, associée au sein du cabinet Robert Walters « les seniors évoquent avant tout l’envie d’évoluer, la flexibilité et le management ». Chacun semble se renvoyer la balle. Pour 36 % des cadres âgés de plus de 50 ans, les changements doivent venir des organisations et des recruteurs. L’Association des directeurs des ressources humaines (ANDRH) en appelle, pour sa part, aux pouvoirs publics, « …nous réaffirmons notre volonté de voir émerger un plan « 1 senior, 1 solution » ».